Ces dernières années, les « zones bleues » ont fait l’objet de nombreuses discussions, présentées comme des régions du monde où la longévité atteint des sommets et où les résidents vivent plus longtemps en bonne santé. Cependant, cette idée populaire est aujourd’hui remise en question par certains chercheurs, semant le doute sur la véracité des données qui ont conduit à cette fascination internationale.
Les zones bleues : un concept séduisant mais trompeur ?
Le concept de « zones bleues » a été initialement proposé pour décrire des régions comme la Sardaigne en Italie, connue pour sa grande proportion de centenaires. D’autres régions ont suivi, notamment Okinawa au Japon, Loma Linda en Californie, la péninsule de Nicoya au Costa Rica et l’île d’Ikaria en Grèce.
Dans ces endroits, un mode de vie sain, une alimentation équilibrée, et une forte cohésion sociale sont souvent cités comme les raisons de cette longévité remarquable. L’idée de vivre longtemps et bien a alimenté un véritable marché de conseils diététiques, livres, et autres produits prétendant reproduire les conditions de ces zones bleues dans nos vies modernes.
Une remise en question des faits
Saul Justin Newman, chercheur à l’University College de Londres, contestent cette vision idyllique. D’après ses recherches, souvent présentées comme irréfutables, les « supercentenaires » ne seraient pas le produit de conditions de vie idéales, mais plutôt le résultat d’erreurs dans les registres ou même de fraudes.
En analysant les données sur des centenaires d’Italie, des États-Unis, de France, du Japon, et d’Angleterre, Newman a constaté que les « supercentenaires » proviennent généralement de régions où l’administration laisse à désirer. Il suggère que les actes de naissance incomplets ou incorrects combinés à des motivations économiques telles que la pension de retraite pourraient expliquer ces âges avancés. Cette problématique n’est pas propre à un seul pays mais bien présente à une échelle mondiale.
Exemples édifiants du Japon et du Costa Rica
Au Japon, un scandale a éclaté lorsqu’une enquête a révélé que des milliers de centenaires étaient en fait portés disparus ou officiellement décédés, suggérant que leurs familles continuaient de percevoir leurs pensions. Un des cas les plus médiatisés est celui de Sogen Kato, déclaré comme la personne la plus âgée de Tokyo jusqu’à ce que ses restes momifiés soient découverts en 2010, bien qu’il soit décédé depuis 1978.
De manière similaire, une étude au Costa Rica en 2008 a montré que 42% des personnes déclarées centenaires avaient fait une erreur ou avaient menti sur leur âge. Ce phénomène met en lumière la réalité selon laquelle la fiabilité des données est aussi variable que complexe à établir.
Les zones bleues, un modèle commercial?
Le chercheur soulève également la question de l’exploitation commerciale des « zones bleues ». Des marques et des entreprises ont établi des produits et services autour de cette idée, prétendant vendre les clés de la longévité. Cependant, si les données de base sont fausses, tout ce marché pourrait être basé sur un mensonge.
Cette interprétation invite à la prudence et à une analyse plus critique des informations relayées sur la longévité. Elle met aussi en avant l’importance de comprendre les véritables facteurs de longévité qui vont au-delà d’une simple localisation géographique.
Conclusion : vers une vision nuancée de la longévité
Saul Justin Newman conclut de manière provocatrice qu’il ne faut pas acheter de solutions simplistes pour espérer vivre plus longtemps. La clé réside plutôt dans des comportements de santé classiques : écouter les conseils médicaux, pratiquer une activité physique régulière, et éviter alcool et tabac.
Alors que les discussions autour des « zones bleues » incitent souvent à l’émerveillement et à l’admiration, il est crucial de considérer les enjeux sous-jacents liés à la pureté des données démographiques et aux motivations parfois financières de leur promotion. L’essentiel reste de se concentrer sur des pratiques de santé éprouvées et universelles, inchangées depuis des décennies et non sujettes aux erreurs de registre.