La récente décision du ministère de la Santé de mettre fin à l’expérimentation du cannabis thérapeutique en France d’ici la fin juin 2025 a suscité une vive inquiétude parmi les patients concernés. Environ 1 800 patients bénéficient actuellement de cet essai, qui était initialement prévu pour se terminer en décembre 2024 mais a été prolongé de six mois. Cette extension, néanmoins, est perçue comme une simple mise en attente jusqu’à son arrêt définitif, laissant de nombreux malades dans un grand désarroi.
Un espoir anéanti pour de nombreux malades
Le cannabis thérapeutique, utilisé notamment sous forme d’huile administrée par pipette, a longtemps été un sujet controversé mais prometteur pour de nombreux patients aux douleurs chroniques. Amélie, 29 ans, souffre d’une maladie rare de la moelle osseuse appelée syringomyélie. Pour elle, la fin programmée de cette expérimentation signifie un retour à une vie de souffrances ininterrompues. «C’était invivable. J’ai dû arrêter mon travail. Je ne voyais plus mes amis. Je vivais en fonction de ma douleur», confie-t-elle, rappelant les jours sombres avant le début de ce traitement.
Les témoignages comme ceux d’Amélie abondent. Véronique, enseignante de 53 ans atteinte de sclérose en plaques, raconte comment le cannabis médical a radicalement amélioré sa qualité de vie en réduisant ses douleurs nocturnes et en facilitant sa mobilité. De nombreux patients partagent cette angoisse de devoir revenir à un quotidien marqué par une douleur omniprésente et peu gérable avec des traitements conventionnels.
L’impact psychologique d’une telle décision
Outre la douleur physique, le choc de l’annonce a également alimenté une détresse psychologique substantielle chez les malades. Sandra, l’une des patientes participant à cette expérimentation, décrit le choc émotionnel comme une «bombe» qui s’est abattue sur elle. Les premiers sentiments de soulagement et d’espoir que ces traitements avaient procurés sont désormais remplacés par la peur et l’incertitude face à l’avenir.
Les professionnels de la santé eux-mêmes ont été surpris par l’annonce et se disent impuissants. Amélie se souvient des assurances fournies par son médecin : au début de l’expérimentation, on lui avait dit que, si le traitement fonctionnait, une dérogation serait mise en place pour les patients. Maintenant, cette promesse semble s’évanouir, aggravant l’incertitude qui pèse sur ces vies.
La question des alternatives thérapeutiques
Avec la fin de ce programme, de nombreux patients se retrouvent face à un dilemme embarrassant. Si certains envisagent d’obtenir leur traitement à l’étranger, notamment dans des pays voisins qui autorisent le cannabis médical, beaucoup se heurtent à des obstacles économiques, légaux et logistiques. Pour d’autres, la perspective de recourir à des opioïdes plus forts, bien que légaux en France, est insoutenable en raison des effets secondaires sévères associés.
L’une des recommandations souvent suggérées à ces patients est d’acheter du cannabis sur le marché noir, une option à laquelle Amélie et d’autres opposent fermement leurs principes. Pour eux, l’objectif est de vivre sans douleur, non pas de subir les effets psychotropes du cannabis récréatif.
Une vision biaisée du traitement au cannabis
Pour Véronique, le langage employé autour du «sevrage» au cannabis thérapeutique est stigmatisant. «On nous parle comme si nous étions des toxicomanes», note-t-elle, déplorant une perception erronée de ce traitement médical par certains décisionnaires. Contrairement aux antalgiques opioïdes qu’elle a précédemment utilisés, le cannabis thérapeutique ne l’a pas rendue dépendante et ne possède pas d’effets psychotropes à faible dosage.
Le sentiment de désespoir et d’abandon est palpable. Sandra évoque même des solutions radicales, envisagées par des patients, telles que l’euthanasie en Belgique, si aucune alternative ne s’offre à eux.
Vers une réévaluation des approches en matière de cannabis médical?
Face à cette situation critique, il devient impératif pour le gouvernement et les professionnels de la santé d’explorer les voies possibles pour intégrer durablement le cannabis thérapeutique comme solution de traitement reconnue. Cette affaire soulève des questions éthiques et médicales sur le droit à une vie sans douleur et le rôle de l’État dans la facilitation ou l’entrave de l’accès aux traitements novateurs.
En conclusion, l’arrêt prochain de cette expérimentation laisse de nombreux patients dans l’attente désespérée d’une solution qui ne transformera pas seulement leur quotidien, mais préservera aussi leur dignité, leur autonomie et leur désir de vie. La France se trouve à un carrefour décisif dans la gestion du cannabis médical, et l’avenir de ces malades en dépend fortement.