Sanofi, l’un des acteurs majeurs de l’industrie pharmaceutique mondiale, a récemment annoncé son intention de céder son usine située à Amilly, dédiée à la production des célèbres médicaments à base d’aspirine Aspegic et Kardegic. Cette décision s’inscrit dans une stratégie plus large de recentrage du groupe sur des médicaments et vaccins innovants. Elle intervient après la vente de sa filiale Opella, responsable du célèbre Doliprane, au fonds d’investissement américain CD&R.
Pourquoi cette vente est-elle stratégique ?
Le ministre de l’Economie, Eric Lombard, a souligné que cette vente fait partie d’une démarche stratégique de réorganisation de Sanofi. Selon lui, la cession s’inscrit dans la continuité de la vente d’Opella et poursuit les mêmes objectifs de stratégie de portefeuille. Cela signifie que Sanofi cherche à se concentrer sur des domaines de croissance jugés plus prometteurs, tels que la recherche en biotechnologie et les vaccins de nouvelle génération.
Malgré les assurances données par Sanofi et le ministre, cette décision suscite des tensions. Des préoccupations ont été exprimées concernant l’emploi et le maintien des engagements pris vis-à-vis des salariés et des collectivités locales. Le site d’Amilly emploie actuellement 276 personnes, et sa fermeture ou même sa modification de gestion serait un important bouleversement pour l’économie locale.
Garanties d’emploi et impact économique
Sanofi a tenté de rassurer les parties prenantes en affirmant que Astrea Pharma, le sous-traitant pharmaceutique, reprendra l’activité avec des engagements clairs en matière de maintien des emplois et des statuts sociaux des employés existants. Le projet proposé stipule le maintien de l’intégralité des effectifs actuels sous la direction de la nouvelle entité, ce qui démontre une certaine volonté de continuité.
Toutefois, le député du Loiret, Thomas Menagé, reste méfiant. Il met en avant le fait que l’usine d’Amilly est la seule en Europe capable de synthétiser le principe actif du Kardegic, essentiel dans la prévention des maladies cardiovasculaires. Avec plus de 27 millions de boîtes vendues chaque année, cette production est non seulement cruciale pour l’entreprise mais aussi pour la région, tant en termes de santé publique que d’emplois.
Une transition surveillée de près
Cette transformation est suivie de près par les autorités françaises. Lors de l’annonce de la vente prévue pour l’automne 2025, l’Etat avait assuré avoir obtenu des garanties auprès de Sanofi et d’Astrea Pharma pour assurer la pérennité des activités et des emplois. Cela inclut des accords tripartites qui incluraient l’Etat, Sanofi et le nouveau propriétaire, prenant ainsi en considération les impacts économiques et sociaux potentiels de cette transition.
Cependant, la perspective d’une délocalisation ou d’une modification du contrôle local de la production reste une source d’inquiétude. Les autorités régionales et les syndicats ont tous exprimé des réserves quant à la capacité du nouveau propriétaire à respecter les engagements en matière d’emploi et de production.
Un défi pour la politique industrielle
Cette opération souligne une tendance croissante dans l’industrie pharmaceutique européenne : la concentration sur des produits de niche à forte valeur ajoutée, en délaissant les productions traditionnelles. Elle pose la question de la souveraineté sanitaire et de l’indépendance pharmaceutique de la France, surtout en cas de crise sanitaire.
Le cas de Sanofi et de son repositionnement stratégique pourrait bien servir de modèle ou d’avertissement pour d’autres entreprises du secteur. Il rappelle également aux décideurs politiques la nécessité d’une réflexion approfondie sur la place qu’occuperont les laboratoires français dans le panorama industriel mondial de demain.
A mesure que l’échéance se rapproche, il est crucial pour l’entreprise et pour les nouvelles entités de prouver leur volonté de respecter leurs engagements et d’assurer une transition harmonieuse qui conserve l’essence même de ce fleuron de l’industrie pharmaceutique française.
L’évolution de ce dossier sera observée avec attention, tant par la classe politique que par le public, en raison de ses répercussions économiques et sociales potentielles. Les mois à venir seront décisifs pour définir l’équilibre entre stratégie d’entreprise et préservation des intérêts locaux et nationaux.